Alassane Ouattara - Nicolas Sarkozy - ONU: Avait-on besoin de ça en Cote d'Ivoire? A quel prix la reconstruction? Et les milliers de vies disparues? Afrique où est ton avenir ?
Alors qu'avec la chute de M. Laurant Gbagbo le 11 Avril 2011, on parle très hâtivement de la fin de la crise, un certain nombre de questions pour bien des observateurs méritent d’être posée: Avait-on besoin de cette guerre pour résoudre ce problème post-électoral? Qui va payer pour la reconstruction de la Cote d'Ivoire ? Quel sort pour les familles des disparues ? L’Afrique a t-elle une place dans la forme actuelle de l'ONU ?
Avait-on besoin de cette guerre en CI pour résoudre ce conflit post-électoral ?
La crise Ivoirienne vient de démontrer une fois encore les appétits de la France et de la Communauté Internationale en Afrique. En la faveur de la crise de nombreuses discussions polarisantes se sont développées ça et là en Afrique et à travers le monde avec plus ou moins de fanatisme selon que l'on était en faveur d'un camp ou de l'autre. L'ONUCI qui avait une mission de certification des résultats des élections pour que les événements de 2000 et 2002 ne se reproduisent plus en CI a géré la crise de façon très partisane ce qui est le résultat que l'on connaît aujourd'hui. Pourquoi n'avoir pas envisagé en aucun moment le recomptage des voix dans la zone contestée comme ça avait été le cas aux USA en 2000 entre M. Georges Bush et M. Al Gore. Ceci aurait permis de prononcer un résultat acceptable qui s'imposerait à tous. Si les élections se sont bien déroulées et que M. Alassane Ouattara a gagné, le recomptage sous la supervision de l'ONUCI aurait validé ce résultat et fait de lui un Président accepté de tous et imposerait à M. Gbagbo une autre place sans violence.
M. Choϊ représentant de l'ONUCI lors de ses multiples conférences de presse à l'ONU indiquait que même en considérant les fraudes au Nord, M. Ouattara était toujours vainqueur. En le disant, il reconnaissait qu'il y avait fraude et s'il y a eu fraude, il devrait avoir annulation ou recomptage dans la zone tout au moins contestée. Pourquoi n'avoir en aucun moment envisagé cette voie du moindre mal et de la réconciliation pacifique ? La réponse est toute simple : l'ONUCI a joué le jeu de M. Ouattara et de la France de M. Sarkozy qui en voulait personnellement au Président sortant. M. Sarkozy s'est à chaque fois comporté comme le vrai « Roi, King » de la Cote d'Ivoire et la communauté internationale a suivi. En d'autres termes le choix de l’Élysée est le choix de la raison pour l'Afrique francophone, peu importe ce que les uns et les autres pensent, peu importe ce qui peut arriver aux populations.
Qui va payer pour la reconstruction de la Cote d'Ivoire ?
L'ONUCI en privilégiant l'option militaire au coté de l’opération Licorne qui a pratiquement doublé ses effectifs de 900 à près de 1650 hommes a donné quitus à l'affrontement armé et la destruction de la Cote d'Ivoire. La France a directement pris part à l'affrontement armé en détruisant toutes les bases militaires de M. L. Gbagbo et lorsque le terrain était nettoyé, les soldats du FRCI sont rentrés dans la résidence de Cocody pour extirper M. L. Gbagbo et sa famille. Ce faisant, l’Élysée a rapidement décliné toute responsabilité directe de l’opération Licorne et donc de la France dans cette arrestation.
La magie de l'image a fait cependant savoir aujourd'hui ce qui s'est en réalité passé. L’Élysée et l'ONUCI ayant accompli cette sale besogne, la question est aujourd'hui de savoir qui va payer pour la reconstruction de ce beau Pays détruit. Le commentaire de M. Christophe Barbier du 5 avril 2011 sur TF1 montre bien que la France en perte de vitesse économique est à la reconquête d'une position plus importante dans le concert des Nations et elle utilise l'Afrique comme levier pour ce positionnement géostratégique et n'est par conséquent pas prête à payer pour les torts qu'elle a commis.
Au contraire elle demanderait plutôt à la nouvelle autorité ivoirienne de payer les factures avec majoration significative de leur intervention. Si la justice des faibles existait dans ce monde, la France et l'ONUCI ne payeraient-ils pas pour toutes les destructions qui ont eu lieu en Cote d'Ivoire ? La réalité est que c'est avec l'argent du contribuable ivoirien qu'il va encore falloir compter pour cela et on se retrouve encore face à une injustice économique pour le peuple ivoirien...
Quels sorts pour les familles des disparues ?
Les révélations d'Amnesty International du 16 Avril 2011 intitulées " COTE D'IVOIRE : LES PHOTOS DE L'HORREUR ET LE CRI D'ALARME D'AMNESTY INTERNATIONAL !!!! " montrent la façon déshumanisante dont les opérations se sont déroulées pendant la reddition et aussi à l'ouest de la CI.
Lorsqu'on regarde ces images macabres, déshonorantes et humiliantes, non seulement on se pose la question pendant tout ce temps, où est passé l'ONUCI qui affirmait devoir avoir la libre circulation ? Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) M. Luis Moreno-Ocampo a annoncé mardi 5 avril 2011 que "des pourparlers étaient en cours avec des pays d'Afrique de l'Ouest pour soumettre aux juges de la CPI des informations sur des atrocités commises en Côte d'Ivoire et permettre l'ouverture rapide d'une enquête sur ces violences". A la vue de ces images, la question est maintenant de savoir qui sera traduit devant la CPI : l'ONUCI pour complicité tacite, M. Sarkozy pour son implication directe, M. Ouattara responsable du FRCI ou alors M. Gbagbo comme ça avait été révélé en mise en garde à plusieurs reprises ? Quel sort va être réservé aux familles des disparues qui ne demandaient que de vivre en paix dans leur Pays et qui ne sont responsables en rien de ce qui leur arrive ? Comment peut-on véritablement parler de réconciliation lorsque l'on agit de la sorte ?
L’Afrique a t-elle une place dans la forme actuelle de l'ONU ?
Lorsqu'on regarde ce qui s'est passé ces derniers mois en CI, on se demande si ça vaut encore la peine à l'Afrique et aux Africains de continuer à appartenir à une organisation qui ne sert visiblement que l’intérêt des plus forts. Le temps n'est-il pas arrivé de faire une démission en bloc et de se consacrer au renforcement de l'Union Africaine qui elle aussi dans la forme actuelle ne fait pas la fierté des Africains. L'Afrique ne devrait réintégrer cette organisation que si à la suite des reformes tels que le suggèrent de plus en plus les laissés pour compte à travers le monde, il y aurait des garanties que ses intérêts seraient préservés dans la nouvelle organisation.
La CEDEAO pendant tout ce temps a joué le rôle de valet prêt à servir les intérêts du maître. Les Africains veulent voir des choses différentes au cours de ces 50 prochaines années car le peuple Africain a mûri de tout ce qu'il a subi pendant les différentes traites, la colonisation et la néo-colonisation. La politique Africaine doit suivre cette évolution de son peuple pour faire en sorte que l'Afrique s'impose elle aussi comme un continent respecté où ses fils s’épanouissent.
Quelles leçons à tirer pour le reste du Continent !!
Au cours de cette année il y aura encore des élections au Nigeria, au Tchad, en Tunisie, en Égypte, à Madagascar, au Cameroun, en RDC, au Sénégal et en 2012 au Zimbabwe, en Angola et au Mali. Les dirigeants et les leaders politiques Africains doivent tirer les leçons de ce qui se passe en ce moment en Cote d'Ivoire, mais aussi en Libye et dans les autres Pays du Maghreb. Les élections présidentielles doivent plutôt servir de levier de développement pour les Pays.
Elles doivent cesser dans l'ensemble du continent d’être l'occasion d’inciter des haines ethnico-tribales qu'on ne voit pour la plupart qu'en ces périodes électorales pour le compte des leaders politiques et non des peuples qui souffrent en fin de compte des combats entre éléphants. La roue du monde tourne et les Africains sont plus que jamais déterminés à travers le continent à prendre leur destin en main pour une Afrique nouvelle.
Vive une nouvelle ère en Afrique.
Adrien Djomo
Source : Cameroonvoice