Photo prise le 19 mai 2011 dans le village guinéen de Tchiakoullé de la maison de la famille de la femme qui accuse Dominique Strauss-Kahn d'agression sexuelle à New York.
Situé dans le Fouta Djallon, berceau montagneux de la communauté Peule de Guinée, ce hameau est constitué de sept maisons "en dur", dont l'une construite par une des soeurs de la victime présumée, et d'une dizaine de cases en torchis, au bord d'une rivière. Pas de route pour y accéder, on y vient à pied.
Femme de ménage au Sofitel de New York, celle qui accuse DSK, ex-directeur général du FMI, "y est née, son papa y est né", déclare Boubacar, son demi-frère de même père qu'elle, à un journaliste guinéen de l'AFP qui s'est rendu à Tchiakoullé où il l'a rencontré, ainsi qu'un oncle de la jeune femme.
Ce journaliste a réussi à localiser le lieu comme étant celui d'où est elle est originaire grâce à des recoupements et vérifications auprès de sa propre famille installée à New York et auprès de celle de la jeune femme.
Le demi-frère, âgé de 42 ans, précise qu'elle y a vécu jusqu'à 13 ans. Elle est ensuite allée à Labé, ville principale du Fouta Djallon, située à environ 80 km, avant de revenir se marier à Tchiakoullé, à 17 ans.
Le couple a eu une fille, mais peu après le mariage, son mari, fils d'un riche marabout peul, est décédé. C'est ensuite que la jeune femme, Peule elle aussi, est partie avec son enfant aux Etats-Unis, selon le demi-frère.
Il précise que c'est la soeur de la victime présumée, Hassanatou, déjà sur place, qui a financé son voyage et son installation à New York, avec l'aide de son mari, commerçant dans cette ville. C'est aussi elle qui a construit à Tchiakoullé, sur l'emplacement de la case de la famille, la maison en dur.
Leur mère y vit habituellement mais était partie se faire soigner à Dakar lorsque le journaliste de l'AFP s'est rendu dans le hameau.
Selon les membres de la famille restés au village, la victime présumée, "très jolie", n'a jamais été à l'école. Elle a seulement fréquenté "l'école coranique" de Tchiakoullé où elle apprenait et récitait, en arabe, les versets du Coran sous une véranda.
Son oncle, Mody, se souvient d'une petite fille qui n'était "pas turbulente". Une autre parente, rencontrée à Labé, affirme que "c'est une fille très sérieuse, très gentille et personne ne lui connaît d'histoire".
Agé d'une soixantaine d'années, l'oncle raconte qu'il y a quelques jours, il a entendu "sur une radio locale qu'un Blanc a abusé d'une fille aux Etats-Unis. Je ne pouvais pas imaginer que c'était ma nièce".
C'est le journaliste de l'AFP qui le lui a appris. Personne ne le savait dans ce village coupé du monde.
La jeune femme est la dernière des six enfants - trois garçons, trois filles - nés d'un des mariages de son père, prénommé Thierno Ibrahima, qui avait deux épouses.
Un père cultivateur, pauvre, mort en 2009 à l'âge de 90 ans, qui était aussi un dignitaire musulman de la région respecté. Sa famille était très pieuse, selon les habitants du hameau.
Contrairement à sa soeur, la jeune femme semble avoir coupé les relations avec Tchiakoullé.
"Depuis que ma soeur est partie il y a plus de dix ans, je ne lui ai parlé qu'une seule fois", assure le demi-frère, qui se souvient : "c'était après le décès de papa. J'étais à Bissau, je l'ai appelée pour lui présenter mes condoléances, mais dès qu'elle a vu le numéro, elle a compris que c'était l'Afrique et elle a répondu: +c'est pas la peine de m'appeler+, elle ne savait pas qui était au bout du fil, quand je lui ai dit, elle s'est ressaisie".
Témoignage similaire de l'oncle Mody : "depuis qu'elle est partie, je n'ai jamais reçu de courrier, de photos, rien".
Des milliers de Guinéens travaillent à l'étranger, dans d'autres pays d'Afrique, en Europe et aux Etats-Unis, car, en dépit de fabuleuses richesses minières, la moitié des 10 millions d'habitants de Guinée vivent sous le seuil de pauvreté.