Un prisonnier politique cubain, Orlando Zapata, est décédé mardi dans un hôpital de La Havane des suites d'une grève de la faim de plus de deux mois pour protester contre ses conditions de détention, une affaire sans précédent depuis des dizaines d'années à Cuba, selon des dissidents.
L'un des 65 «prisonniers de conscience» cubains d'Amnesty International, Orlando Zapata, 42 ans, «est décédé vers 13h00» mardi à l'hôpital Hermanos Ameijeiras, dans le centre de la capitale cubaine.
Il s'agit du premier détenu politique «à mourir en détention depuis le début des années 1970 à Cuba», a affirmé à l'AFP la Commission pour les Droits de l'Homme et la Réconciliation nationale qui a pu confirmer sa mort auprès de sa famille.
Zapata, qui était membre d'une organisation de défense civique illégale, le Directoire démocratique cubain, avait été condamné en 2003 à 18 ans de prison pour «désordre public», selon la Commission, une organisation illégale mais tolérée par le pouvoir cubain.
«C'est une grande tragédie pour sa famille et une très mauvaise nouvelle pour tous les mouvements de défense des droits de l'Homme, mais aussi pour le gouvernement qui devra payer le prix politique de cette mort», a déclaré Elizardo Sanchez, à la tête de la Commission.
«Il s'agit d'un assassinat virtuel, prémédité», a estimé Elizardo Sanchez en accusant les autorités d'avoir trop tardé à offrir des soins au dissident en grève de la faim depuis plus de deux mois qui avait été transféré la semaine dernière de Camaguey (centre), où il était incarcéré, dans un hôpital de La Havane. «Ils l'ont tué», a quant à elle déclaré la mère de Zapata.
Interrogé par l'AFP, un diplomate en poste à Cuba a jugé cette affaire«bien sûr mauvaise pour l'image de Cuba» mais dit douter beaucoup qu'elle amène des modifications dans les relations avec l'île communiste qui jouit du soutien des pays d'Amérique latine.
Les présidents brésilien Luiz Inacio Lula Da Silva et vénézuélien Hugo Chavez sont ainsi arrivés mardi soir à La Havane, sans faire de commentaires à la presse, après un sommet dit de "l'Unité" au Mexique des 32 pays de la région.
Les autorités cubaines, qui n'ont fait aucun commentaire, accusent les dissidents d'être des «agents» ou des «mercenaires» à la solde des États-Unis. Ce pays impose depuis 48 ans un embargo contre l'île qu'il accuse de bafouer droits et libertés.
Prix Sakharov 2002 du Parlement européen, le dissident chrétien Oswaldo Paya a accusé dans un communiqué les autorités cubaines d'avoir «assassiné lentement» ce maçon de profession et Noir de peau, victime, selon lui, de coups et de violences racistes lors de sa détention.
Il a également dénoncé «tous ceux qui à Cuba ou hors Cuba, par lâcheté ou égoïsme, n'appuient pas ceux qui luttent, souffrent et meurent pour défendre les droits et la dignité de tous».
L'économiste dissident Oscar Espinosa Chepe, arrêté en 2003 et libéré pour des raisons de santé, a estimé que cette affaire pourrait se reproduire en raison du «très mauvais état» des prisons cubaines où aucune organisation internationale n'est admise.
Seul pays du continent dirigé par un parti unique, communiste, Cuba comptait au début de cette année, selon la dissidence cubaine, 201 détenus politiques.
(Source AFP)
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