Vous êtes un cadre du FPI et maire de la commune de Zikisso, une zone reputée proche de l’ancien Président Laurent Gbagbo. Comment se fait la réconciliation dans votre localité ?
La réconciliation recouvre un certain nombre d’actes et de comportements qui vont vers le développement. Il faut faire en sorte que les gens, dans une même communauté,s’acceptent mutuellement. C’est un acte de pardon. Ce pardon, on ne peut pas l’obtenir tant qu’on ne va pas vers les autres. Pour une bonne réconciliation,on doit faire un brassage à tous les niveaux. Si la réconciliation doit être bien menée, elle doit se faire avec la base politique. C’est pourquoi, nous les élus, prenons notre bâton de pèlerin pour aller vers nos populations. C’est le développement qui réconcilie véritablement. Notre région est une des régionales plus en retard en Côte d’Ivoire. Il faut qu’on parle le même langage si nous voulons sortir du sous développement. Il faut que le développement soit partagé par tous. Et pour que le développement soit partagé, il faut qu’on s’accepte mutuellement. En tant qu’élus, nous sommes les vecteurs du développement et nous disons que ce sont les infrastructures qui réconcilient. C’est pourquoi, il faut appliquer la politique de la personne qui est au pouvoir. Appliquer la politique du régime en place, ne veut pas dire qu’on a été corrompu. Moi, j’ai opté de parrainer la candidature du ministre Zakpa Kobenan aux élections régionales dans le Lô-Djiboa. Or, dans le programme des régionales, il n’y a pas de programme politique, mais des projets de développement. Donc nous soutenons le ministre Zakpa Kobenan. C’est comme çaque nous allons favoriser la réconciliation et par ricochet, le développement de notre région.
Pourquoi avez-vous décidé de participer aux élections municipales alors que votre parti politique, le FPI, a formellement interdis à ses militants d’y prendre part ?
Quand on est dans unerégion qui est très en retard comme celle de Lakota; quand on est dans une régionqui a été abandonnée depuis les années 57 par le PDCI, vous voulez qu’on fassequoi. L’espoir a été créé avec le FPI. Malheureusement, nous ne sommes pasallés au bout du processus. Qaund le FPI a pris le pouvoir, c’était pour fairele développement. Aujourd’hui, le RDR parle de développement, mais ledéveloppement n’a pas de couleur ni de parti pris. C’est l’Etat qui développe.Et tant que nous sommes des citoyens de cet Etat, nous ne pouvons pas refuserles projets de développement conçus par cet Etat. Je pense que sur cettequestion, le FPI doit mettre à l’aise nos parents. Le FPI doit mettre nosparents dans une position qui ne donne pas dos au développement. Etmoi, c’est mon combat. Je ferai en sorte que nos parents comprennent quecelui qui est élu pendant les élections, c’est celui-là même qui va promouvoirle développement. Il sera difficile après,qu’on parte vers une personne qu’on n’a pas votée pour lui soumettre desprojets. Il faut qu’on refléchisse et qu’on dise à nos parents que boycotterles régionales et les municipales, c’est boycotter le développement. Il ne fautpas qu’on s’inscrive dans cet élan.
Est-cepour cela que vous êtes candidat à votre propre succession?
Je suis candidat indépendant. Mais je reste FPI pur et dur. C’est-à-dire que rien ne m’enlevera au FPI. Ma candidature indépendante ne veut pas dire que je ne suis pas logique avec moi même. On peut être FPI et être logique. J’ai été élu maire pour développer une localité. Est-ce qu’en tant qu’élu, je peux demander aux populations qui m’ont élu, de tourner le dos au dévelopement ? Je dis non.
N’avez-vouspas peur des sanctions que la direction de votre parti menace de prendre contre tous les indisciplinés ?
Aujourd’hui, la direction du parti est dans une logique que nous connaissons tous. Nous sommes avec la direction du parti dans cette logique. Seulement, nous disons que, dans les applications des logiques, il y a des moments. Il y a des logiques qui correspondent à des moments donnés et d’autres, qui ne correspondent pas à telou tel autre moment. Pour l’heure, et pour nous qui sommes à Lakota, je ne pense pas que c’est la logique du boycott qui fera notre affaire. La logique du boycott ne nous arrangera pas, surtout parce que nous sommes le bastion du FPI.Il faut qu’on tende la main à celui qui est au pouvoir pour qu’il pense à nous et pour ne pas qu’il nous marginalise. On ne peut pas avoir besoin d’eau à boire et détruire un château d’eau. On a vu l’entourage du Président Laurent Gbagbo. L’entourage de Gbagbo, c’était eux, les gens du RDR. Ils sont allés au fond du pouvoir de Gbagbo et ont eu tous les bénéfices de ce pouvoir. Mais quand le pouvoir FPI est tombé, ils se sont tous ressaisis. Pourquoi nous aussi, on ne ferait pas comme eux pour être dans la mouvance et permettre ainsi à nos populations de vivre tout-en sachant d’où on vient? Nos racines sont et restent au FPI. Personne ne peut me radier du FPI. Je suis membre du Comité central du FPI à part entière. Je pense que pour me radier, il y a aura une discussion. Ils vont me convoquer et je vais m’expliquer. Puisque la décision de radiation ne se prend pas d’office. On doitm’entendre d’abord. Et je pense que j’aurai des arguments. La politique de la chaise vide a ses avantages, mais je pense que quand il s’agit du développement,elle ne peut que produire des inconvénients sur les populations qui sont déjà suffisamment appauvries. Il faut qu’on tourne la page. Tourner la page ne veut pas dire ne plus suivre le FPI. On peut rester au FPI et mener un combat d’utilité. Moi, je mène un combat d’utilité. La région est déjà en retard. S’ily a un pouvoir en place qui doit faire 5 ans et que, pendant les 5 années, on doit donner dos au développement, mais le retard s’aggrave de 5 ans encore. C’est de cela que je parle.
A moins d’un mois des élections, quel est votre appel à l’endroit des populations ?
Je voudrais demander aux populations de Zikisso, de Lakota, du Lô-Djiboa qui est notre région, de ne pas obéir à un quelconque mot de boycott actif. Que les populations accompagnent le candidat de leur choix, mais le candidat qui a les moyens de sa politique. Le pouvoir central aujourd’hui est incarné par le RDR. Il est tout à fait indéniable que l’élu du RDR aura de l’emprise dans les instances de décision. L’élu du RDR aura la tâche facile pour entrer là où il faut rentrer pour prendre les moyens. Or, nous avons besoin de moyens pour nous développer. Aujourd’hui, tous les projets que nous voyons font partie du Programme présidentiel d’urgence (PPU). Alors est-ce qu’on peut se mettre à dos une telle organisation ? Les moyens, il faut aussi que nous en ayons pour développer nos régions. On ne peut pas attendre que le FPI revienne aux affaires pour commencer le développement. Mais le temps que le FPI n’est pas aux affaires,nous accusons un retard. On a boycotté les législatives qui sont des élections politiques, et le boycott a marché. Mais aujourd’hui, il s’agit du développement. Il faut que nos frères du FPI se ressaisissent. Il est question de lutter pour développer nos régions. Il faut qu’on soit dans les conseils municipaux et régionaux pour poser les préoccupations de nos parents. Et pour être dans les conseils, il faut participer aux élections.
Par Tobi David
NB: Article paru dans La Matinale avant les élections du 21 avril 2013
30 Jun 2013 - 17:25:44
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